PROTESTATI­ON DE TRESHAVT ET TRESPVISSANT PRINCE François, Fils & Frere de Roy: Duc d'Alençon & d'Eureux, Comte de Dreux, du Per­che, &c.

LIEVTENANT GENERAL POVR LE ROY EN TOVS SES PAYS, Terres & Seigneuries, protecteur de la liberté de la couronne'de France opprimee par les estrangers.

Nouuellement Imprimé à Alençon auec Priuilege. 1575

PROTESTATI­ON DE TRESHAVTET Trespuissant Prince, Francois Fils & Frere De Roy, Duc D'Alencon, &c.

FRançois, Fils & Frere de Roy, Duc d'Alençon, Pre­mier Pair de france, &c. A toꝰ ceux qu'il apartiendra, e Salut. Scauoir faisons que nous deuëment aduertis & informez que de l'obseruation des loix depend la conseruation de tous Royaumes & Sei­gneuries, & par ce moyense nourrit & entretientla paix entre les subiectz: ain­si quand elles ne sont gardees en la pu­reté qu'elles nous ont esté laissees par nos deuanciers, & qu'elles viennent à languir, & sont comme mortes & ense­uelies, les subiects se licencient & dis­pensent, & s'abandonnent ayseementà [Page 4] toutes dissolutions lesquelles causentle plussouuentles guerres ciuilles: & final lemēt la dest ruction des Royaumes, Re publiques & Communautez, si prōp­temētilny est pourueu & remedié par la diuine bōté de Dieu, qui suscite quād illuy plaist dexcellēs & heroiques per­sonages, pour s'opposer à la tyrānie de ceux, qui ne demandent que de mettre toutes choses en confusion pours enri­chir à quelque prix que se soit du sang & sueur des poures, ons emparer desditz Royaumes & Seigneuries. Ce que noꝰ apprenons par les ruines dinfinis roy­aumes florissans qui ont par ce moyen prins fin. Qui doit seruir dexemple à tous vrays françoys, pour les stimuler & inciter à remettre sus les anciēnes loix & empescher chacun en son endroit & selon les moyens que Dieu luy a depar­ty, quil ne tombe entre les maīs de ceux qui l'ōt guetté de si long temps, & pour y paruenir nourrissent & entretiennent [Page 5] le discord que nous voyons, se cou­urās du different qu ily a de la Religion. Lequel ils seroyent biē marrys de veoir appaisé, comme ils est veu & cogneu par les choses passees, afin de dōner cou leur aux tailles, impostz & subsides qu'ils inuententtous les iours en leuant sur le Poure peuple, la Noblesse & le Clergé au nom du Roy, & sous ombre del acquitter, que cela ne tend qu à en­richir quelque peu des personnes pres­que tous estrangers, qui se sont empa­rez du Roy & des principaux estatz, & gouuernementz de ce Royaume contre les loix d'iceluy. Toutes lesquelles en­treprises ne pouuans trouuer bonnes, auons esté calomniez enuers le Roy no stre trescher Seigneur & frere, & à ceste cause en danger de nostre vie, & detenu cōme chacun scait. Ce que nous auōs souffert, esperant que le Roy remedi­eroit à tant de miseres, & ne se laisseroit plus circunuenir de tant de gens, & [Page 6] qu'il cognoistroit nostre innocence. Mais voyans la playes empirer de iour en iour, & personne n'estre plus indi­gnement traicté, que nous: & que tant de Princes, Seigneurs & Gentilshom­mes, gens de l'eglise, Citadins & Bour­geoys auoient les yeux fichez sur nous, nous tendoient les mains & imploroiēt nostre ayde: estans vaincus de leurs prieres, & cōpatissans à leurs miseres: nous nous sommes resolus, postposans toute craincte de mort, qui nous estoit prochaine, essayer de sortir de la ca­ptiuité où nous estions pour prendre la cause publicque en main, & nous opposer aux pernicieux conseilz des perturbateurs de ce Royaume: enquoy nous auons esté tant fauorisez de Dieu, que le xvj. iour de Septēbre nous som­mes arriuez à nostre ville de Dreux, où se sont rendus à nous plusieurs Seig­neurs & Gentilshommes, & autres tant du Clergé, que du tiers estat dece Roy­aume. [Page 7] Ausquels auons declaré nostre vouloir & intētion, n'estre d'entrepren­dre aucunement sur l'authorité du Roy nostre dit Seigneur & Frere: laquelle nous desirons cōseruer & accroistre de nostre pouuoir. Mais seulementnous ēployer de toutes nos forces, voire ius­ques à n'espargner nostre vie & biens pour dechasser les perturbateurs du re pos public: poursuyure la iustice de tant de pilleries, larrecīs, homicides & mas­sacres, inhumainement & contre tout droict & raison cōmys & perpetrez au veu & sceu d'un chacun: deliurertant de Seigneurs, Gentilshommes & autres constituez prisonniers, ou bannis à tort & sans cause: les remettre & toutes autres gēs de bien en leurs biens, estats & honneurs: abolir toutes tailles, sub­sides & imposts mis sur le poure peu­ple par la malice & suggestion des e­strangers, contre les anciennes loix & statuts de ce Royaume: entretenir la [Page 8] Noblesse & Clergé en ses priuileges, franchises & libertéz anciennes: & esta­blir en France vne bonne, stable & fer­me paix. Pour cefaire nous nentēdons vser d aucuns moyens que de ceux des­quels nos predecesseurs se sont aydez: & qui sont vsitez de tout temps en ce Royaume: quand il est question de la re­formation de la Religion & Iustice, qui sont les deux colonnes de toute monar chie, pour remettre le Royaume en sa premiere splendeur, dignité & liber té, c'est assauoir par vne assemblee generalle, & libre de troys estats de ce Royaume, conuoquee en lieu seur & li­bre. De laquelletous estrangers soyent exclus. Protestant deuant Dieu (lequel nous appellons à nostreayde, & lequel aussi nous nous asseurons quil guidera nostre entreprise) n'estre esmeuz ny in­duictz à ce faire d'aucune cupidité de vengeance priuee (combien que pour les torts qui nous ont esté faicts nous [Page 9] en eussions iuste occasiō) ou de grādeur ou desir de commander plus que nous ne faisons & ne nous appartient. Nous contentans, comme nous en auons bō ­ne occasion, des biens, authorité, & grandeur que nous auons de la grace de Dieu & de sa benignité & largesse, nous ayant fait naistre de Pere Roy, & ordonné la secōde personne de ce Roy­aume. Ques iladuiēt (à Dieune plaise) nous appeller auant que pouuoir veoir lafin & execution de ceste tant saincte entreprise, nous nous reputerons tres­heureux d'auoir pour icelle employe nostre vie, qui concerne le seruice de Dieu & du Roy, la franchise & liberté de la Noblesse & du Clergé, le repos & soulagement du Peuple, & liberté de la patrie. Et pour oster tout empesche­ment, & reunir les coeurs des naturels Françoys, nous les auons pris & pre­nons en nostre protection & sauuegar­de tāt d'vne que d'autre religion, les pri­ant [Page 10] & exhortātau nom de Dieuse com­porter les vns auec les autres, comme freres, parēs & cōcitoyens, sans se pro­uoquer par iniures ou autrement, ius­ques à ceque par les Estats generaux, & assemblee de Cōcile, il soit pourueu sur le faict de la Religion: permettre & laisser iouir vng chacun de l'excercice d'icelle. Prions tous Roys, Roynes, Prin­ces, & Potentatz, Republicques, & tous autres voysins, alliez, & confederez de ce Royaume & Couronne, qu'ils nous fauorizent, aydent & secourent en ceste tant saincte & louable entreprise, dene prendre aucune opinion de nous que celle que tesmoignons par ceste presen te protestation. Prions aussi tous Prin­ces, Seigneurs, Gentilshommes, Bour­geoys, Villes, & tous autres subiects de la Couronne, denous venirtrouuer & accompaigner, secourir des viures, ar­mes, argent, & autres leurs moyens, à ceque par leur faute & negligence, l'e­xecution [Page 11] de nostre entreprise si haute, nesoit differee & la paix retardee. De­clarant nos ennemys ceux tant seule­mēt, qui par force s'opposeront & tas­cherōtd empescher nostre entre­prise, & nos amys, ceux quileur courrontsus.

Signé Francoys.

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